10 questions sur les PME en Côte d’Ivoire

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  • Date: mar. 0
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Au cours de leur cérémonie marquant la remise des diplômes de fin de cycle, des étudiants en Management Marketing, d’une grande école de la place m’avaient convié à dire une conférence dont le thème : Les PME en Côte d’Ivoire, menaces et opportunités.

Une conférence classique aurait souhaité, dans sa méthodologie, que je leur propose un exposé magistral pour dérouler la problématique, à partir de divers constats, ensuite développer mon argumentaire sur le fond de la question. En fin de compte, je devrais répondre à une série de questions se rapportant plus ou moins au sujet.

Mais loin, et je le crois, à l’opposé de ce cliché, je leur ai suggéré, après un exposé liminaire de quelques dix (10) phrases, de me proposer selon leur propre compréhension une série de 10 questions se rapportant au thème sus-indiqué ; je répondrai automatiquement à ces questions et je me ferai l’obligation, au besoin, d’y ajouter d’autres qui me paraitraient également pertinentes.

Voilà en résumé les questions posées (nous les avons rangées dans un ordre qui paraît mieux agencé) et les réponses apportées.

 

  1. Qu’est ce qu’une PME/PMI ? comment en crée t-on ?

Votre question est générique mais pertinente. Mais je vais vous répondre sur la base de certaines références hors du champ de la Côte d’Ivoire et ensuite vous donner des indications sur le cas ivoirien. Par ce qu’il n’y a de classification PME/PMI que par l’espace économique concerné.

D’abord en Europe, notamment en France, la PME est une entreprise qui doit satisfaire à deux conditions cumulatives sur trois. Primo, elle doit employés au moins 250 salariés ; secundo elle doit avoir un chiffre d’affaire de moins de 50 millions d’Euros ou un total de bilan de n’excédant pas 43 millions d’euros. Cette forme de nomenclature est partagée par les pays d’Afrique du Nord comme le Maroc et d’autres encore.

En revanche, dans les pays d’Afrique subsaharienne, la PME est  essentiellement qualifiée à partir de son Chiffre d’affaire et du personnel permanent. Et malheureusement, les textes restent un peu vagues. Prenons le cas du Burkina Faso, une PME est toute entreprise personne physique ou morale productrice de biens et services marchands, immatriculée au registre de commerce ou tout autre registre, totalement autonome, dont l'effectif ne dépasse pas deux cent (200) employés permanents et dont le chiffre d'affaires annuel est inferieur ou égal à un milliard (1 000 000 000) FCFA avec un niveau d'investissement inferieur ou égal a 250 000 000 FCFA et qui tient une comptabilité régulière.

En CI, depuis janvier 2012, les PME ont eu un cadre légale de reconnaissance. Est considérée comme PME, toute entreprise qui a un chiffre d’affaire inférieur à 1 milliard de FCFA ou moins de 200 salariés permanents.

Pour la sous-question (comment crée t-on une PME ?), retenez que cela obéît sensiblement aux mêmes conditions de forme et de fonds qu’une grande entreprise. Mais depuis quelques mois, le CEPICI a mis en place un guichet unique des formalités des entreprises qui permet de créer sa PME en 48h.

      

      2. Le nouveau code des investissements fait obligation aux entreprises agréées par le CEPICI de produire chaque année des rapports de responsabilité sociétale d’entreprise (RSE). Les PME sont-elles aussi concernées que les grandes entreprises ?

Oui tout simplement. Toutes les entreprises bénéficiant des dispositions de faveur du Code des investissements ont sensiblement les mêmes obligations. C’est en cela que la menace ou l’opportunité peut se dessiner pour une PME. Nous nous posons la question de savoir comment ces petites structures pourraient produire des rapports RSE. Encore qu’il est pratiquement su de tous que les multinationales et les grandes entreprises n’ont pas encore déférées à cette obligation morale d’intégrer la démarche de la RSE dans leurs activités. A tout cela il faudra ajouter le coût financier que la production d’un tel rapport pourrait engendrer. Pour un simple exemple, je ne connais pas plus de dix (10) grandes entreprises en Côte d’Ivoire qui produisent un Rapport RSE ou un simple rapport social.

On peut même se risquer de dire que cette disposition complique quelque peut la tâche aux PME. Pour remédier à cela, nous pouvons proposer de catégoriser les entreprises par secteur d’activité. Il y a des secteurs plus contraignants que d’autres.

 

    3. Le gouvernement ivoirien a adopté en 2012 un nouveau code des investissements. En quoi ce code diffère-t-il de celui de 1995 et qu’apporte-t-il de façon spécifique aux PME ivoiriennes ?

Merci pour votre question. Je crois que j’ai essayé d’apporter quelques éclairages sur cette question dans un article que j’ai eu à publier. Ma réponse, ne traitera pas de tous les aspects…

Le premier plus grand mérite c’est que les PME bénéficient des mêmes conditions d’éligibilité que les grandes entreprises. Mieux elles ont un seuil d’investissement plus bas. Ce n’était pas le cas dans le code de 1995. Deuxièmement, il est accordé plus d’avantages aux PME qu’aux grandes entreprises. Par exemple, à conditions d’exploitation égale une PME aura 7 ans d’exonération lorsqu’une grande entreprise en a 5.

 

      4. Selon vous, quelle place est-il fait aux PME dans le Programme National d’Investissement adopté par le gouvernement?

Votre question est quand même difficile. Bon, je vais essayer de vous apporter quelques éléments de réponses. Effectivement, la question fait référence aux opportunités et aux menaces. Je peux la reformuler ainsi : Le Plan National de Développement 2012-2015 est une menace ou une opportunité pour les PME ?

La difficulté que nous avons est celle là : Nos politiques restent très souvent floues sur certaines questions existentielles et essentielles. C’est le cas du PND 2012-2015. Pourquoi ? Nous voyons dans ce Plan :

-          Construire des universités et des écoles ;

-          Construire des hôpitaux et des centres de santé ;

-          Construire des routes etc.

Croyez-moi, ce sont bien des entreprises qui vont construire tout cela. Mais quelles entreprises ? Seulement des multinationales ou des grandes entreprises ?

Pour ma part, je crois qu’il faut préciser quelques éléments sur l’attribution des marchés aux entreprises. C’est ce que nous avons appelé un moment partenariat privé-privé à côté du classique partenariat public-privé (PPP). De quoi s’agit-il ? Imposer par exemple aux multinationales et grandes entreprises de sous-traiter certains lots de leurs marchés publics aux PME. Avant cette exigence, l’Etat doit pouvoir amorcer une véritable politique d’intégration des PME dans le tissu économique. Cà me fait penser à la loi de finance 2014 de la France. Lorsque vous prenez l’annexe du projet de loi de finance 2014, vous y trouvez tout une batterie d’actions concrètes à l’égard des PME. Cà c’est une politique à long terme.

Pour terminer sur cette question, bien que mon sentiment soit un peu mitigé, je crois que le PND n’est, en tout cas, pas une menace pour les PME. Une opportunité ? Toute la question sera comment s’y prendre ?

 

         5. Beaucoup de PME se plaignent des difficultés d’accès aux crédits bancaires. A votre avis, quelle corrélation peut-il y avoir entre bonne gouvernance et accessibilité des PME aux financements bancaires ?

Votre question est très intéressante. Pourquoi ? Je travaille sur un projet concernant cette problématique. L’une des exigences a été de recueillir les avis des dirigeants des PME d’une part et ceux des banquiers d’autre part. Croyez-moi le faussé est abyssal. L’on découvre par exemple que pour l’entrepreneur (PME) aucune corrélation ne devrait exister entre la gouvernance de son entreprise et la décision de financement d’une institution financière. A l’opposé, ces dernières, bien qu’elles ne mentionnent pas ces exigences de manière formelle, elles y tiennent absolument. Vous imaginez bien qu’une entreprise doit pouvoir fournir des états financiers passés et prévisionnels pour prétendre à un crédit ? Or la production de ces états exige à tout point de vue une certaine bonne gouvernance de l’entreprise.

Pour moi la corrélation est très forte. Et je peux même vous dire qu’au terme de ce projet, nous avons pu établir ce qu’on a appelé le coût de mal gouvernance en matière d’accès aux financements.

 

Je vous propose la suite des questions dans une prochaine publication.

 

OUATTARA Navaga,

Président du Réseau d’Appui aux Jeunes Entreprises pour la Solidarité

Expert-Consultant, APEX-CI, FARE-PME

Ouattara.navaga@yahoo.fr

 

 



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